À la fin des année 90, je découvre la stéréoscopie qui m’apparait alors la possibilité de nouvelles expériences optiques et artistiques. C’est alors que ma réflexion s’oriente vers de nouveaux types d’expériences à travers les concepts de rivalité binoculaire et d’espaces complexes. Au début, j’utilisai une vieille caméra stéréo 35mm et la modélisation 3D deviendra principalement l’outils pour explorer ces phénomènes intriguants.
Ma démarche consiste à utiliser la modélisation 3D pour créer des espaces virtuels dans lesquels apparaissent de nouveaux phénomènes optiques générés grâce à l’utilisation du fameux stéréoscope à miroir inventé, en 1838, par le physicien anglais Charles Wheatstone (1802-1875). Les espaces virtuels et les formes agissent en tant que stimuli sur la vision binoculaire donnant lieu à une nouvelle expérience visuelle pour la conscience : la manifestation d’une perspective complexe.
Une expérience escherrienne de l’espace que notre esprit tente alors de résoudre. À travers elle, le sens de la vue se transforme, entraînant avec lui la pensée et l’intuition géométrique. L’idée, ici, serait d’entrevoir ces réalités par l’entraînement du regard. En somme, l’effet du psychisme sur la vision physique peut devenir l’objet même de la contemplation artistique.
À travers cette approche, l’objet d’art peut devenir, en quelque sorte, une forme de « réalité augmentée » à défaut d’autres termes, réalité qui est alors manière d’ubiquité.
Cette démarche artistique, qui peut sembler revêtir une rigidité qui l’apparenterait à la science de l’optique, laisse quand même toute la place à l’aléatoire et à l’intuition esthétique. Ce qui se manifeste du point de vue de la caméra virtuelle n’est pas intrinsèquement déterminé, joué d’avance, sinon cela enlèverait la possibilité de faire des découvertes inattendues qui sont, au fond, l’œuvre du hasard, de la force inestimable de celui-ci. Comme dans la peinture, ce même hasard, combiné aux accidents de parcours qui surviennent aussi en utilisant l’outil numérique 3D, peut orienter l’élaboration de l’œuvre d’art en lui accordant, à la fin, un caractère étrange, un déploiement inédit.